Utilisé depuis des siècles aussi bien comme aliment que comme remède naturel, le cynorrhodon — le petit fruit rouge de l’églantier (rosier sauvage) — est réputé pour sa richesse en nutriments et ses vertus bienfaisantes. Dans cet article, partons à la découverte de ce trésor vitaminé de l’hiver, de sa composition exceptionnelle, de ses usages en herboristerie traditionnelle et de ses préparations culinaires gourmandes.
Nom et famille botanique
Nom latin : Rosa canina
Famille : Rosacées
Noms communs
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Églantier
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Rosier sauvage
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Rosier des chiens
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« Gratte-cul » (surnom du fruit)
Description de la plante
L’églantier est un arbuste épineux pouvant atteindre 1 à 3 mètres de haut. Ses feuilles vertes sont composées de 5 à 7 folioles dentées. En mai-juin, il se couvre de fleurs simples, rosées ou blanchâtres, à cinq pétales, au parfum délicat. Ces fleurs laissent place dès la fin de l’été à des fruits ovoïdes rouge vif appelés cynorrhodons. En réalité, il s’agit de faux-fruits charnus renfermant de nombreux akènes (graines dures) entourés de poils urticants. Le cynorrhodon possède une peau lisse et brillante, rouge orangé à maturité, et une pulpe sucrée-acidulée appréciée des oiseaux et des cueilleurs.
Où pousse-t-il ? (Terroir)
Plante rustique commune dans les régions tempérées d’Europe, l’églantier pousse à l’état sauvage en bordure de chemins, haies champêtres, lisières de forêts et coteaux ensoleillés. Il supporte des froids intenses et pousse même en moyenne montagne (jusqu’à 2000 m d’altitude). On le trouve sur des sols plutôt riches en humus, bien drainés, en situation ensoleillée ou mi-ombragée. Très résistant, il colonise facilement les terrains en friche et demande peu d’entretien lorsqu’il est cultivé au jardin.
Son histoire
Le nom vernaculaire de rosier des chiens provient d’une légende rapportée par Pline l’Ancien : une décoction de racines d’églantier aurait guéri la rage d’un chien, d’où le terme Rosa canina (rose canine). Depuis l’Antiquité, les baies d’églantier figurent dans la pharmacopée traditionnelle : en Perse, le cynorrhodon était utilisé contre les calculs rénaux et pour calmer les règles trop abondantes; au Moyen Âge, on le consommait aussi comme confiserie riche en saveur et en vitamine C. Ce petit fruit sauvage a même joué un rôle important plus récemment : durant la Seconde Guerre mondiale, les Britanniques organisèrent des collectes de cynorrhodons pour préparer un sirop vitaminé destiné aux enfants (afin de pallier la pénurie d’agrumes). De nos jours, le cynorrhodon reste populaire en herboristerie familiale et en cuisine automnale, entre autres à travers la fameuse confiture d’églantine maison.
Phytothérapie
Parties utilisées et récolte
En herboristerie, la partie la plus utilisée de l’églantier est son fruit, le cynorrhodon lui-même. On le récolte à l’automne, de préférence après les premières gelées, lorsque il est bien mûr, rouge-orangé et légèrement ramolli (plus facile à travailler). Les fruits peuvent ensuite être utilisés frais ou séchés. On les trouve généralement coupés ou entiers en herboristerie. Avant usage interne, il est indispensable d’ouvrir chaque fruit pour retirer les akènes et surtout les poils urticants, responsables du fameux effet de poil à gratter. On obtient ainsi la pulpe nette, prête à être infusée ou cuisinée. Par ailleurs, d’autres parties de l’églantier connaissent des usages spécifiques : par exemple les jeunes pousses (bourgeons) sont utilisées en gemmothérapie (macérât de bourgeons) pour leurs vertus stimulantes et anti-infectieuses ciblées, et les pétales servent à fabriquer de l’eau de rose parfumée. Néanmoins, ce sont bien les fruits qui concentrent la majorité des bienfaits.
Principes actifs majeurs
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Vitamine C – Teneur exceptionnellement élevée (jusqu’à 20 fois plus qu’une orange à poids égal), ce qui en fait un puissant antioxydant naturel et un atout pour l’immunité. Le cynorrhodon contient également des vitamines B1, B2 et K en plus petite quantité.
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Flavonoïdes – Pigments végétaux antioxydants (rutine, quercétine, etc.) qui contribuent à protéger les cellules du stress oxydatif.
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Caroténoïdes – Autres pigments (bêta-carotène, lycopène…) à l’action antioxydante, précurseurs de la vitamine A, et responsables de la belle couleur orangée des baies.
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Tanins – Composés au goût astringent, présents dans la peau du fruit, aux propriétés légèrement antiseptiques et anti-diarrhéiques (en « resserrant » les tissus).
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Pectines – Fibres solubles abondantes dans la pulpe, qui gonflent en présence d’eau et forment un gel. Elles facilitent le transit intestinal en douceur et aident à piéger les toxines. Les pectines donnent également au cynorrhodon son pouvoir légèrement gélifiant utile en confiture.
(À noter : le cynorrhodon renferme aussi des acides organiques naturels (acide citrique et malique), du sorbitol, une touche de vanilline et même des traces d’huile essentielle – autant de composés qui participent à ses arômes et effets).
Propriétés principales et usages traditionnels
Le cynorrhodon est traditionnellement utilisé en phytothérapie (principalement en usage interne) pour :
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Stimuler les défenses naturelles et augmenter la résistance de l’organisme en cas de refroidissement, de grippe ou d’infection, ainsi qu’en prévention des maux d’hiver.
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Combattre la fatigue et l’asthénie, notamment après une maladie (convalescence) ou lors des changements de saison. Sa richesse en vitamine C en fait un tonique général bénéfique en cas de carence (par exemple chez les fumeurs ou personnes stressées qui ont un besoin accru en antioxydants).
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Apaiser les troubles digestifs tels que la diarrhée et l’entérite, grâce à son effet astringent sur les muqueuses. Dans la médecine populaire, le cynorrhodon était même considéré comme vermifuge et utilisé pour aider à expulser les parasites intestinaux chez l’enfant.
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Soulager les douleurs articulaires d’origine inflammatoire (arthrose, rhumatismes). Des préparations à base de cynorrhodon sont rapportées pour atténuer les douleurs de l’ostéoarthrite ou de la polyarthrite rhumatoïde, ce qui rejoint ses usages anti-inflammatoires traditionnels. (De récentes études scientifiques tendent d’ailleurs à confirmer l’effet anti-douleur d’extraits d’églantier sur les articulations sensibles.)
Modes d’utilisation et posologie
En tisane (infusion ou décoction)
La tisane d’églantier est une des manières les plus simples de profiter des bienfaits du cynorrhodon. En infusion classique, versez environ 1 à 3 cuillères à café de cynorrhodons séchés (pulpe coupée) dans 250 ml d’eau frémissante, puis couvrez et laissez infuser 10 minutes avant de filtrer. On obtient une boisson à la belle couleur orangée, à la saveur légèrement acidulée, que l’on peut agrémenter d’une cuillère de miel. Cette infusion vitaminée aide à stimuler l’immunité et à vous hydrater pendant les mois froids – on en boira 1 à 3 tasses par jour en cure préventive ou en cas de coup de froid.
Pour un usage plus spécifique (notamment en cas de diarrhée), il est conseillé de préparer une décoction de cynorrhodon : démarrer l’infusion à l’eau froide et porter à ébullition douce pendant 2 à 3 minutes, avant de laisser infuser 10 minutes hors du feu. Cette méthode permet d’extraire davantage de pectine et de tanins, renforçant l’effet astringent. Bien filtrer à travers un linge fin ou un filtre en papier afin de retenir tous les poils et impuretés, puis boire par petites tasses au cours de la journée.
À savoir : on peut aussi utiliser le cynorrhodon en teinture mère (alcoolature). Il suffit de faire macérer les fruits secs dans de l’alcool (vodka, alcool de fruit) pendant 3 semaines, puis de filtrer. On obtient un extrait hydro-alcoolique concentré, à prendre en 20–30 gouttes dans un peu d’eau, 2 à 3 fois par jour. Ce mode d’extraction, plus puissant, est prisé pour une action renforcée sur l’immunité ou les articulations par exemple. Par ailleurs, la gemmothérapie utilise le macérat de jeunes pousses d’églantier (bourgeons frais mis en glycérine), à raison de quelques gouttes par jour, notamment pour soutenir les enfants fréquemment malades.
En sirop
Grâce à sa richesse en vitamine C et à son goût agréable, le cynorrhodon a longtemps été transformé en sirop fortifiant pour affronter l’hiver. Le sirop d’églantier se prépare traditionnellement en faisant d’abord bouillir les fruits dans de l’eau, puis en filtrant pour récupérer un jus concentré que l’on fait cuire avec du sucre (ou du miel) afin d’obtenir un sirop épais. Ce sirop rouge orangé, riche en vitamine C, était autrefois administré aux enfants pour prévenir le scorbut et les grippes. On peut en prendre une cuillère à café par jour en cure, ou l’utiliser comme sirop gourmand dans un yaourt, une salade de fruits, etc. (Il existe d’ailleurs des sirops tout prêts à base de cynorrhodon dans le commerce, mais rien ne vaut le fait maison !) Traditionnellement utilisé comme tonique hivernal, ce sirop naturel soutient l’organisme et apporte une dose d’énergie fruitée.
En cuisine (confitures, gelées, etc.)
Le cynorrhodon est aussi un fruit sauvage comestible très apprécié en cuisine. Sa pulpe, une fois débarrassée des graines et poils, peut être cuisinée de multiples façons. La préparation la plus connue est sans doute la confiture de cynorrhodons (surnommée confiture de gratte-cul) : en faisant cuire longuement la pulpe avec du sucre, on obtient une confiture d’un beau rouge orangé, au goût doux légèrement acidulé, riche en vitamine C. On peut également réaliser une gelée transparente en ne conservant que le jus extrait des baies. Ces confitures et gelées d’églantier sont délicieuses sur les tartines et apportent une touche d’originalité rustique.
En outre, le cynorrhodon se prête à d’autres recettes : par exemple, on peut l’intégrer dans un coulis ou une sauce pour accompagner du gibier (sa légère acidité relève bien les viandes), le transformer en purée sucrée pour garnir des desserts, ou même le faire sécher pour l’incorporer dans des mélanges de tisanes fruitées. Dans certains pays, on prépare une soupe sucrée de cynorrhodons (très populaire en Scandinavie, servie avec de la crème). Enfin, le jus fermenté de cynorrhodon peut servir de base à des sirops ou des liqueurs artisanales.
Astuce cueillette/cuisson : après la récolte, il est recommandé de congeler les fruits une nuit afin de ramollir leur peau et faciliter l’extraction de la pulpe. Lors de la préparation culinaire, prenez bien soin d’éliminer tous les petits poils irritants avant de consommer la pulpe (au besoin, passer le tout au tamis fin après cuisson). Ce travail un peu fastidieux garantit une dégustation sans encombre de vos gelées et sirops maison !
En macérât huileux (soin externe)
Chose moins connue, le cynorrhodon peut aussi s’utiliser en application externe. En effet, les baies d’églantier contiennent de nombreux caroténoïdes et autres antioxydants utiles pour la peau. On peut réaliser un macérât huileux de cynorrhodons : il s’agit de faire infuser les fruits séchés dans une huile végétale neutre (tournesol, amande douce…) pendant plusieurs semaines, à température douce, afin que l’huile s’enrichisse des composés du fruit. L’huile obtenue prend une teinte orangée et peut s’utiliser comme soin cosmétique. Traditionnellement, cette huile de cynorrhodon est appliquée sur les peaux sèches ou irritées, pour favoriser la régénération cutanée et atténuer les rougeurs ou cicatrices (d’une façon comparable à la célèbre huile de rose musquée, extraite d’une rose voisine). On peut ainsi confectionner des baumes maison en mélangeant ce macérât huileux de cynorrhodon avec de la cire d’abeille et d’autres ingrédients apaisants, pour nourrir l’épiderme en profondeur.
Précautions d’emploi
Le cynorrhodon fait partie des remèdes naturels les plus sûrs : aux doses usuelles d’usage alimentaire ou infusé, il ne présente pas de toxicité connue. Il est bien toléré par la grande majorité des personnes, y compris par les enfants et les personnes âgées. Toutefois, certaines précautions simples sont à respecter :
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Retrait des akènes et poils : Ne consommez jamais les fruits tels quels sans préparation. Les akènes et surtout les petits poils à l’intérieur du fruit sont très irritants pour la bouche et le tube digestif – ils peuvent provoquer de vives démangeaisons s’ils sont ingérés. Veillez donc à bien filtrer les préparations (tisanes, décoctions) et à passer les pulpes au tamis fin pour éliminer ces poils avant consommation.
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Allergies : Si vous êtes sujet aux allergies aux fruits de la famille des Rosacées (rosiers, pommes, poires… qui appartiennent à la même famille botanique), soyez prudent lors de l’utilisation du cynorrhodon. En cas de doute, commencez par une petite dose pour vérifier l’absence de réaction.
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Interactions et santé : Le cynorrhodon étant riche en vitamine C, une consommation excessive (sous forme de compléments concentrés par exemple) peut éventuellement troubler le transit (effet laxatif léger) chez certaines personnes sensibles. Respectez les dosages recommandés. En présence de troubles digestifs chroniques (ulcères, colites…) ou de traitements médicaux en cours, il est conseillé de demander l’avis d’un professionnel de santé avant d’entreprendre des cures de cynorrhodon. De manière générale, par précaution, les femmes enceintes ou allaitantes veilleront à un usage modéré (le cynorrhodon en tant qu’aliment est sans danger, mais évitez l’automédication sans avis médical).
Avertissement
Cet article est informatif et ne remplace pas un avis médical. En cas de doute, de traitement en cours ou de problème de santé, demandez conseil à un professionnel de santé qualifié avant d’utiliser des plantes médicinales.
En résumé
Le cynorrhodon est un petit fruit sauvage aux grands bienfaits, un allié précieux pour passer l’hiver en forme. Riche en vitamine C et en antioxydants, il stimule l’immunité tout en combattant la fatigue, et ce sans effets indésirables majeurs. Polyvalent, on peut autant le savourer en sirop ou en confiture qu’en infusion bien-être. Pensez à lui lors de vos balades automnales : quelques baies rouges d’églantier récoltées et séchées vous permettront de concocter de délicieuses tisanes et recettes traditionnelles, prolongeant ainsi les saveurs et bienfaits de la nature dans votre quotidien.
Commentaire
1 comment
Merci pour votre article . Je mets les cynorrhodons au congélateur , puis j’attends qu’ils décongèlent, je les mixent entiers avec un peu d’eau , et je les passent au moulin a légumes pour retirer les poils et les pépins je récupère ce jus j’y ajoute du sirop d’agave ou du miel et un peu d’alcool a fruits . Je conserve au frigo et j’utilise une c a s par personne dans un smoothie .